Cet article fait partie de la série Portrait d’athlète, mettant en avant des sportifs de haut niveau. Ce premier volet est consacré à Camille Pouget, qui évolue en équipe de France d’escalade.
Ces dernières années, j’ai passé du temps au contact de sportifs de haut niveau (SHN) dans le domaine de l’escalade. A force de les observer au téléobjectif pendant les compétitions, j’ai appris à mieux les connaître, et à comprendre leurs défis, au quotidien et sur une saison de grimpe. Et puis je suis papa d’un compétiteur, et je vois aussi les choses de l’intérieur. Donc je suis conscient que le haut niveau demande un investissement important. Et il ne fait pas de cadeau. Toutes les victoires s’obtiennent au mérite, et les contre performances servent à se construire.
C’est en combinant ces différentes perspectives que j’ai eu envie de dresser des portraits de ces athlètes hors du commun. Néanmoins, je suis plus à l’aise avec un appareil photo, qu’avec un stylo. Et donc, ces portraits seront avant tout photographiques, ponctués de petites histoires qui se cachent derrière les images.
Cet article est donc le premier de la série Portrait d’athlète, et j’ai choisi de lancer cette nouvelle aventure avec le portrait de Camille Pouget. En effet, j’ai eu l’occasion de la photographier à plusieurs reprises ces cinq dernières années, et elle a accepté de m’accorder sa confiance pour ce projet. Mon intention n’est pas de faire un portrait en mode question/réponse classique. Il faut reconnaître que je ne suis pas journaliste, et d’autres le font déjà très bien, comme par exemple les différentes interviews de Camille par PlanetGrimpe (voir les références à la fin de l’article). J’ai fait le choix de vous faire découvrir Camille, au travers de mon regard, de mon objectif, et des compétitions sur lesquelles j’ai pu la suivre.
Briançon – 2018
Ma première rencontre photographique avec Camille était en 2018, lors de la coupe du monde de difficulté à Briançon. Je passais la semaine au Mondial de l’escalade en famille, et j’avais prévu de faire quelques photos. Cette année-là, chez les hommes Romain Desgranges termine deuxième derrière Alex Megos. Et chez les femmes Janja Garnbret ne laissait que peu de chances à ses rivales, alors que la première Française, Nolwenn Arc terminait huitième. C’étaient les premiers pas de Camille en sénior, au niveau mondial dans cette discipline, et elle terminait 23ème sur 66 compétitrices, ce qui est fort honorable pour une première participation, alors à peine âgée de 15 ans ! Je crois que j’ai rejoint le fan club de Camille à ce moment-là 😉
Cliquez sur les vignettes pour voir les photos en grand !
En la suivant au travers de mon viseur, j’ai découvert une jeune grimpeuse déterminée, et souriante. Probablement très heureuse de venir se frotter au gratin mondial. Je me souviens de l’émotion ressentie en prenant cette photo, alors qu’elle se balançait au bout de sa corde, en descendant de sa voie. Ce large sourire et cette attitude détendue m’a fait penser à une forme de sérénité. Je l’ai imaginée penser à quelque chose du genre : “OK, pour une première c’est pas si mal, mais il reste du travail. Je reviendrai plus forte.”
[François] Camille, tu te souviens de ce que tu as pensé à ce moment-là ?
[Camille] Oui ! À ce moment-là, je ressentais une joie immense. J’étais tellement fière d’avoir pu me hisser dans cette demi-finale et à la fois impressionnée par la foule qui m’avait encouragée et applaudie. J’ai su alors que je voulais vivre cet instant le plus de fois possible, et que je voulais aller voir à quoi ressemblait ce sentiment après avoir vécu une finale.
Lyon – 2021
Suite à ce mondial, et en traitant mes photos, j’ai cherché des informations sur internet, pour mieux connaître son parcours. J’ai alors réalisé qu’elle n’était pas arrivée dans la cour des grands par hasard… En effet, Camille qui a rejoint l’équipe de France en 2016, était déjà sacrée championne de France et championne d’Europe dans la catégorie jeune en 2017. Et ce n’était que le début d’un palmarès qui n’arrête pas de s’enrichir (voir le palmarès de Camille à la fin de l’article).
Ma deuxième rencontre photographique avec Camille s’est produite beaucoup plus tard, à l’occasion du salon de l’escalade, encore sur Lyon à l’époque. C’était en novembre 2021, et j’étais venu faire quelques photos du concours de bloc organisé lors de cet événement. Comme beaucoup de compétiteurs ce jour-là, Camille était très détendue pour ce concours sans enjeu. Tout le monde avait la banane, ce qui m’a permis de produire les images ci-dessous.
La banane, d’accord, mais l’envie de gagner aussi ! Quand on a l’esprit de compétition, il est là quel que soit le niveau et l’enjeu.
[François] Camille, te souviens tu dans quel état d’esprit tu étais pour ce concours ?
[Camille] Sur le salon de l’escalade, j’étais venue à la base pour participer à une conférence sur le mental avec Jonathan Bel Legroux mon coach mental et pour rendre visite à mes sponsors respectifs. Je me rappelle que j’avais participé aux qualifs au dernier moment à l’arrache sur un coup de tête, c’était pas prévu et finalement je m’étais qualifiée pour la finale. En finale, c’était vraiment bonne ambiance et en petit comité. J’avais vraiment pris plaisir à m’amuser dans les blocs.
Anse – 2022
Ma troisième rencontre photographique avec Camille était à domicile ! Le club AL Escalade de Anse, dont je suis membre, a organisé la coupe de France de bloc sénior en décembre 2022. J’ai couvert l’événement, avec l’aide de Christophe, un ami photographe. Tout au long de la journée, j’ai été impressionné par la gentillesse et la disponibilité de cette jeune athlète. Toujours attentionnée pour ses jeunes fans, et toujours souriante. Camille a décroché une deuxième place, et elle est repartie avec un joli panier garni. Je me suis inquiété de la pertinence d’un tel cadeau pour un sportif de haut niveau.
[François] Camille, qu’as-tu fais de ce panier ?
[Camille] Bah… C’est vrai que ça peut être un sujet un peu sensible la nutrition en escalade, faut pas oublier que c’est son propre poids qu’on monte en haut au final haha. Mais je pense qu’il ne faut pas oublier que ça reste un jeu avant tout et qu’il faut savoir garder le plaisir des choses simples de temps en temps.
Quelques jours après la compétition, Camille m’a contacté pour savoir comment récupérer les photos. On a un peu échangé via Instagram. Je partage mes photos d’escalade sur les réseaux sociaux depuis quelques années. Alors j’ai vu passer un peu de tout en matière de communication. Et là je l’ai sentie très franche et très spontanée dans ses retours. A une époque où on a vite tendance à basculer dans le faux-semblant, j’ai trouvé ça très agréable.
J’ai réalisé qu’elle avait une sensibilité particulière pour les photos d’escalade. Elle affectionne les jolis mouvements, les mêmes qui m’amènent à déclencher. C’est peut-être ce point commun qui m’a donné l’impression qu’on parlait le même langage, et qui m’a donné envie d’aller un peu plus loin.
Arnas – 2023
Ma rencontre suivante avec Camille était à Arnas, chez nos voisins du club Vertige escalade, pour une étape de la coupe de France de difficulté, en avril 2023. Je savais que Camille était inscrite, et j’espérais la voir arriver en finale et pouvoir lui offrir de jolis clichés. Elle a répondu présente en topant les deux voies de qualification, et la voie de demi-finale. Cela s’est compliqué en finale, et elle a obtenu la quatrième place.
Après cette compétition, Camille m’a une nouvelle fois remercié pour les photos partagées. Et c’est là que j’ai commencé à lui parler de ce projet de portraits d’athlètes. Elle a été partante aussitôt et m’a proposé de la rejoindre lors d’une séance d’entraînement. Il ne restait plus qu’à définir le jour et l’endroit…
Marseille – 2023
Un peu plus tard, en mai 2023, c’est à Marseille que je retrouve Camille, pour une quatrième étape de la coupe de France. C’était l’occasion de faire une nouvelle série de photos, mais aussi de discuter de notre projet, qui se dessinait plus précisément. Côté compétition, Camille a reproduit le schéma d’Arnas. Deux tops en qualification, un top en demi-finale, mais cette fois une deuxième place en finale. Belle performance !
Et au passage, un moment très émouvant à la fin des demi-finales quand Juliette se jette dans les bras de sa grande sœur qui vient de toper sa voie. C’est beau une famille soudée.
Valence
Nous y sommes ! Camille m’a proposé de la rejoindre le 24 mai à la cité de l’escalade de Valence, la très belle salle du club Mineral Spirit. Comment refuser ?!
Camille est arrivée accompagnée de son entraîneur Mike Fuselier, et d’autres membres du pôle de Voiron. Comme à son habitude, Camille était souriante et disponible. Nous avons convenu ensemble du déroulement de la séance : d’abord les photos en tenue de ville, puis les photos en action sur le mur. Elle précise qu’une grosse séance de difficulté l’attend. Il faut que je sois efficace !
Côté ville
Pour les photos en tenue de ville, nous avons choisi la mezzanine de la salle. J’ai repéré des fenêtres avec une belle lumière. Puis nous enchaînons sur le toit du fronton de bloc. Et pour finir nous allons vers le balcon avec vue sur la grande salle, où la suite de l’entraînement va se dérouler.
Pendant cette séance, j’ai été impressionné par l’aisance de Camille devant l’objectif. Elle m’avoue qu’elle commence à s’habituer grâce aux interviews (qui sont de plus en plus courantes dans le monde de l’escalade) et aux séances photos organisées par ses partenaires. Cela explique pourquoi elle me semble si détendue. Je n’ai pas cherché à la faire poser comme on peut le faire en photographie de mode, ou en portrait de studio. Le but était de trouver des attitudes les plus naturelles possibles, et le fait que cela se passe dans une salle d’escalade était finalement une bonne option pour qu’elle se sente dans son élément. La séance n’a duré que quinze minutes, mais j’ai vraiment beaucoup apprécié ce moment.
[François] Et toi Camille, comment as-tu vécu cette séance « express »?
[Camille] En réalité j’étais pas si à l’aise non plus sur cette séance de portrait. Ce n’est pas encore dans mon habitude de poser devant un photographe. Et surtout, pour un cliché en mode « ville ». Ça m’a bien sorti de la zone de confort ! Mais j’ai trouvé ça intéressant et amusant au final. Et je suis contente du rendu des photos, je les trouve très stylées.
J’ai libéré Camille pour qu’elle puisse enchaîner sur sa séance d’entraînement. Mike l’attendait de pied ferme, et je ne voulais pas avoir de problème avec ce monsieur 😉
Côté sport
Comme dans toute bonne séance, Camille a commencé par une voie de chauffe, avant de monter progressivement en régime, pour finir sur des voies dans le 8b.
J’ai aussi pris quelques photos quand elle n’était pas sur les murs, mais en train de se préparer ou de se reposer. J’aime bien ces moments entre les efforts, pendant lesquels l’athlète cherche à se détendre ou au contraire à se concentrer. Ce sont encore d’autres attitudes, toujours très intéressantes à observer.
Même si la salle est grande, pas facile pour un photographe de se faire oublier au milieu des grimpeurs. Et même si j’ai cherché à être discret, Camille a reconnu que ma présence l’avait un peu perturbé en début de séance, avant d’en faire abstraction et de retrouver sa pleine concentration. J’avoue que je l’avais ressenti un peu comme ça aussi, donc pas assez discret finalement. L’exercice n’est pas si facile que ça, ni pour elle, ni pour moi.
Au final, je suis très satisfait de ce qu’on a produit. Et les quelques heures passées avec Camille m’ont conforté dans l’opinion que j’avais déjà de cette athlète : l’équipe de France peut être fière de la compter dans ses rangs. Et je suis convaincu qu’elle va nous montrer de très belles choses dans les années à venir. Mais surtout Camille, pas de pression 😉
Remerciements
- Camille POUGET
- Michaël FUSELIER (entraîneur du pôle France de Voiron)
- Mineral Spirit (club d’escalade de Valence)
- L’équipe de la cité de l’escalade, très sympathique
- Les grimpeurs présents ce jour-là, qui ont accepté ma présence 😉
Palmarès de Camille Pouget
(à la date de rédaction de cette page)
- Championne de France jeune 2017, 2018, 2019 et 2021
- Championne d’Europe jeune 2017 et 2019 (vice championne d’Europe en 2022)
- 3ème au championnat du monde jeune en 2021
- Vice championne de France sénior 2021
Références
- Interview-Portrait: Camille Pouget, étoile montante de l’escalade française
- Liste des sujets sur Camille Pouget, chez PlanetGrimpe
- Profil IFSC (j’adore la photo de profil)
- Mon activité photo de sport
- Toutes mes photos d’escalade
- Mes éditions spéciales ArtSport by franLero